Postulat n° 100 - Rapport final du Conseil communal

Résumé du postulat

Selon les deux Conseillers généraux, la Ville ne dispose pas d’une grande palette de mesures en faveur de la mobilité des seniors et des personnes en situation de précarité financière. A l’image de ce qui a été fait pour les écoliers, ils estiment nécessaire d’examiner ce qui pourrait être réalisé pour cette tranche fragile de la population, comme par exemple la mise à disposition de cartes journalières, leur élargissement ainsi que leur promotion.

Réponse du Conseil communal

Revue de la "littérature" au niveau suisse

Selon la page Politique de la vieillesse de l’Office fédéral des assurances sociales,

[…] La politique et l'action concrète dans le domaine de la vieillesse relèvent en grande partie des cantons, des villes et des communes, et de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) fournissent des prestations pour les personnes âgées. […] Au sens large, la politique de la vieillesse concerne un large éventail de thèmes et de domaines politiques, dont: […] l’aménagement du territoire, le logement et la mobilité […]. La politique de la vieillesse a pour objectifs de mieux reconnaître la contribution que les personnes âgées apportent à la société, de veiller à leur bien-être et d'assurer leur sécurité matérielle. Elle doit encourager leur autonomie et leur participation, et renforcer la solidarité entre les générations.  […]

Fort de ce constat, de nombreuses communes en Suisse mettent en place des conditions de mobilité et un espace public adapté à la présence et aux déplacements d’un public plus âgé. La revue Rue de l’Avenir a relevé dans ses numéros différents besoins des aînés. Le premier consiste en la présence de mobilier urbain adapté, comme par exemple des bancs publics ou encore des feux piétons laissant suffisamment le temps de traverser la route. Le deuxième consiste en différentes mesures augmentant le sentiment de sécurité, comme par exemple de l’éclairage public.

Outre les efforts faits sur l’environnement, des aides existent pour les seniors en terme de formation. Celles-ci sont proposées par des municipalités et permettent d’apprendre à acheter un billet de bus à l’automate, à monter dans un bus pour ceux qui se déplacent en rollator, etc.

Des aides dans les déplacements sont en outre proposées contre une petite participation financière par des associations aux personnes nécessitant un accompagnement pour sortir de chez elles et se rendre à leurs rendez-vous ou en commissions. Ces prestations sont par exemple fournies par ProSenectute ou la Croix-Rouge au niveau suisse.

De plus, diverses associations comme l’AVIVO, l’ASAR, le MDA, le CSA, la FARES ou encore Gérontopôle Fribourg/Freiburg veillent à la défense des intérêts des seniors.

Au niveau suisse, il existe donc différentes aides et moyens permettant de favoriser et d’encourager la mobilité des seniors, tout spécialement lorsque ceux-ci ne peuvent plus se déplacer seuls. Si des subsides à l’AVS peuvent être versés, il existe toutefois peu d’aides financières spécifiques et sans contrepartie pour les transports en commun urbains des seniors. La Ville de Nyon offre une subvention pour l’achat des abonnements de transports, mais cette subvention est destinée à tous les habitants et non aux seuls seniors. Une exception prévaut: la Ville de Martigny, qui, depuis 2019 offre un abonnement pour les bus urbains aux plus de 65 ans. Cet abonnement annuel pour adulte est proposé usuellement à 603 francs. C’est pour l’instant la seule ville suisse à avoir adopté un tel système. La Ville de Martigny paie les courses directement à la compagnie de bus. Il faut noter que cet abonnement gratuit pour les retraités n’est pas lié à l’abandon du permis de conduire. La ville de Martigny justifie cette décision notamment par la volonté de réduire le trafic en ville, de remplir les bus aux heures creuses et de permettre aux retraités de sortir plus facilement. Il faut par ailleurs relever que la Ville de Martigny n’offre pas d’abonnement de bus pour tous les écoliers.

Concernant les abonnements, les CFF proposent un abonnement général senior à 2'880 francs/an contre 3'860 francs/an pour les actifs. Les CFF ont aussi un abonnement ½ tarif au prix de 185 francs, disponible pour tous. Par ailleurs, les Cantons de Vaud, Neuchâtel et du Jura offrent une subvention (200 francs dans le canton de Vaud) à l’achat d’un premier abonnement général senior pour les retraités acceptant de renoncer à leur permis de conduire. Il s’agit d’un versement unique, qui n’est pas répété en cas de renouvellement de l’abonnement l’année suivante. Le Canton de Vaud a également décidé d’élargir cette mesure à partir de 2020 pour les abonnements des transports publics régionaux.

Selon un communiqué de presse conjoint de l’Académie suisse des sciences, de l’Association des communes suisses et de l’Union des villes suisses portant sur la politique des villes et communes en faveur des aînés, il est jugé que les villes et communes de Suissesse préoccupent et investissent dans une politique favorable aux aînés. Le rapport pointe toutefois un besoin d’action dans différents domaines, dont la mobilité.

Aides à la mobilité des seniors à Fribourg

La politique Senior+ présente les lignes directrices de la politique du Canton de Fribourg en faveur des seniors. Toutefois, elle ne mentionne pas spécifiquement la mobilité ni les aides qui y seraient liées.

En terme d’aides financières, le Service de l’aide sociale de la Ville de Fribourg n’intervient en principe pas pour les bénéficiaires de l’AVS, qui disposent de ressources supérieures aux normes sociales (sauf très rares exceptions). C’est l’association ProSenectute qui se charge de distribuer des aides ponctuelles. Les personnes dans le besoin doivent déposer un dossier auprès de ProSenectute, qui peut décider, après examen, si la personne est éligible pour une aide financière ou non.

En matière de réductions, les seniors de la Ville de Fribourg peuvent bénéficier de l’abonnement général senior à 2880 francs/an contre 3'860 francs/an pour les actifs ou de l’abonnement ½ tarif des CFF à 185 francs, disponible pour tous. Par ailleurs, il existe également des cartes journalières CFF. A Fribourg, elles sont vendues par l’AGEF dans ses locaux de Miséricorde au prix de 44 francs pour les personnes qui ne sont pas étudiantes. 19 cartes journalières sont disponibles, soit 6935 par année. Selon l’AGEF, elles sont très courues en été, mais il est assez facile de s’en procurer presque chaque jour en hiver. Les TPF, qui sont seuls compétents concernant la fixation de leurs tarifs, ne proposent pas de prix avantageux pour les seniors, ni au niveau des billets individuels, ni au niveau des abonnements.

En ce qui concerne l’aide à la personne, la section fribourgeoise de ProSenectute propose le service "Avec" qui consiste en une présence de 1-3h au prix de 25 francs pour de la compagnie mais aussi avec la possibilité de se faire accompagner pour ses achats ou chez le médecin. La Croix-Rouge, le Service d’entraide ou l’association Passepartout proposent elles aussi des accompagnements dans les déplacements contre une petite rémunération. Ces déplacements sont en principe assurés par des bénévoles. Une partie de ces prestations sont remboursables par certaines assurances. L’association Reper, dont le public-cible n’est pas les seniors, propose une fois par an en été un service de déplacement en tuk-tuk pour les personnes âgées. Le tuk-tuk est conduit par des jeunes. Il est gratuit et a pour but de créer du lien entre les générations.

Nous rappelons également que la Ville, par l’ancien Service des Institutions et assurances sociales, accordait une participation mensuelle de 15 francs aux bénéficiaires des prestations complémentaires pour le financement de leur abonnement de transports publics. Toutefois, cette prise en charge a cessé avec le budget 2008 (dernier montant budgétisé en 2008 à hauteur de 80'000 francs, montant effectivement payé 102'230 francs; reliquat de 26'733 francs payé en 2009; rubrique 1040.366.10), pour des raisons financières; cette aide posait également des problèmes de compatibilité avec le calcul des PC, qui englobent déjà les coûts de transport.

En résumé, à Fribourg, des aides financières sont possibles pour les personnes aux moyens très limités. De plus, des services d’aides payants sont bien établis pour les personnes ne pouvant plus accomplir seules leurs déplacements. Toutefois, il n’existe pas de soutien financier pour les seniors bien portants qui ne sont pas en situation de précarité, si ce n’est l’abonnement CFF senior ou les réductions accessibles à tout un chacun (abonnement CFF ½ tarif ou cartes journalières CFF).

Offre de l’abonnement TPF  - Limite financière

En termes financiers, et selon les données du contrôle des habitants au 2 mars 2020, offrir un abonnement TPF au tarif adulte (les TPF ne proposant pas de tarif préférentiel aux seniors), soit 612 francs, représenterait une charge pour la Ville allant de 4.1 mio à 1.3 mio de francs, ceci dépendant si l’abonnement doit être offert à l’ensemble des plus de 65 ans ou respectivement limité à une tranche d’âge plus restreinte.

A titre de comparaison, le financement de l’ensemble des élèves, au tarif enfant, soit 459 francs, représente une charge de 1.3 mio de francs pour la Ville. Un financement du même ordre de grandeur que celui accordé pour les écoliers ne couvrirait donc que les seniors de la tranche d’âge 80+, dont un certain nombre ne peut ou ne souhaite plus se déplacer aussi fréquemment. Puis, un élargissement de cette tranche d’âge aux 75+, 70+ ou 65+, qui sont plus mobiles que leurs aînés et donc probablement plus prompt, plus nombreux à vouloir bénéficier de cette prestation de la Ville, augmente fortement les charges de celle-ci à 2.1 mio de francs, respectivement 3.1 mio et 4.1 mio de francs.

L’hypothèse de déduire les pensionnaires des EMS de la liste des bénéficiaires a également été prise en compte, mais l’impact est faible, à savoir que les charges mentionnées précédemment peuvent être réduite au maximum de 0.2 mio de francs.

Pour finir, l’hypothèse d’une limitation de l’offre aux seniors 65+ aux revenus imposables plus modestes a également été étudiée. Pour cela, différents paliers de revenus imposables ont été pris en compte sur ce panel 65+. Suivant le degré de plafonnement du revenu imposable, l’impact pour la Ville peut être réduit de 4.1 mio de francs jusqu’à hauteur de 0.8 mio de francs dans le cas où seuls les ménages sans aucun revenu annuel imposable seraient soutenus. Les données fiscales pouvant fluctuer passablement d’une année à l’autre, le même exercice a également été fait sur l’année fiscale 2017. Il en ressort qu’une fluctuation jusqu’à hauteur de 0.35 mio de francs doit être prise en compte comme marge sur les montants d’abonnements indiqués pour chaque tranche de revenus imposables.

Etant donné les charges financières importantes devant être absorbées par la Ville, notamment au travers des amortissements des investissements que la Ville va entreprendre ces 5 à 10 prochaines années, ainsi que l’incertitude concernant les rentrées fiscales futures suite aux récents événements en lien avec le COVID 19, une augmentation des charges fixes pérennes nécessitera une économie importante sur d’autres postes de dépenses, afin de garantir un équilibre budgétaire. Le Conseil communal est d’avis que l’engagement de dépenses fixes pérennes de cette ampleur semble actuellement inapproprié.

Conditions de mobilité des seniors à Fribourg

La Ville de Fribourg s’attache à développer un espace public propice à la mobilité de tous et notamment à celle des seniors. Avec l’âge, certaines personnes se sentent moins sûres d’elles ou ont plus de peine à marcher. Différentes mesures sont en cours de réalisation ou en voie de l’être. Tout d’abord, la mise aux normes des quais de bus à la LHand (loi sur les handicapés) est en cours. Ces mises aux normes sont réalisées en fonction des opportunités liées aux chantiers routiers.

De plus, la création de zones de rencontre ou de zones 30 km/h apporte plus de sécurité et de confort en diminuant l’aspect routier des espaces et les différences de vitesse entre les usagers. Outre la création de zones, une limitation à 30 km/h devrait être prochainement mise en place sur plusieurs axes de la ville. L’entrée en force de cette mesure est suspendue à une décision de la DAEC, qui est compétente pour fixer les limitations de vitesse.

Outre les limitations de vitesse, des améliorations régulières de l’espace public sont entreprises, que ce soit dans le cas de projets de réaménagement, de requalification, de modifications ponctuelles ou d’entretien. Ces améliorations consistent par exemple en l’ajout de bancs, l’enlèvement d’éléments gênant le passage, etc.

Comme une grande partie des déplacements à l’intérieur de Fribourg sont de très courtes distances, ils peuvent souvent être faits à pied, ce qui représente un mode de transport gratuit et bon pour la santé. Pour rappel, le diamètre maximal de la commune de Fribourg est de 5 km.

De plus, la Ville de Fribourg soutient le développement du réseau cyclable et également du réseau de vélos en libre-service. Depuis 2019, celui-ci est majoritairement équipé en vélos électriques, qui peuvent aussi être utilisés par des seniors qui ne seraient plus en mesure de pédaler dans des montées.

En résumé, la Ville de Fribourg soutient et promeut une mobilité douce, qui, pour des déplacements de courtes distances, peut largement remplacer l’usage des transports en commun.

Synthèse

Certaines réductions (CFF) et aides existent, notamment pour les seniors en grande difficulté financière ou à mobilité réduite. Cependant, la Ville de Fribourg n’a pas d’influence sur la politique tarifaire des TPF et une généralisation de l’offre d’abonnements destinés aux seniors, à l’image de ce qui a été mis en place pour les écoliers, ne serait économiquement pas soutenable.

La gratuité des transports publics permettrait très probablement une plus grande attractivité des TP, ce qui, dans une certaine mesure, soutiendrait le transfert modal des transports individuels motorisés vers une mobilité plus durable. Toutefois, il ne faut pas négliger les coûts qu’entraînent les déplacements et il semble cohérent que les usagers paient le juste prix du service qu’ils utilisent. Dans cet ordre d’idées, des mesures devraient avant tout être prises vis-à-vis des TIM. Aujourd’hui, le coût de la mobilité individuelle ne couvre de loin pas le coût de ses nombreuses externalités (émission de Co2, pollution sonore, visuelle, accidents…).

La question de la gratuité des transports publics est un débat vaste et complexe qui fait partie des préoccupations de la Ville de Fribourg. En effet, comme illustré dans cette réponse au postulat n°100, la Ville s’attache à offrir un espace public agréable et propice à la mobilité de tous.

Au vu de ce qui précède, le Conseil communal estime avoir répondu aux questions posées par les auteurs du postulat.

Le postulat no 100 est ainsi liquidé.