Postulat n° 139 (2021-2026) - Rapport final du Conseil communal

Résumé du postulat

Le boulevard de Pérolles a été conçu sur le modèle des grandes villes à la fin du 19ème siècle de manière innovante et courageuse sous la forme d'une large avenue bordée d'allées, afin de créer une zone de commerce et d'affaires en dehors de la ville médiévale. Le développement souhaité n'a cependant commencé qu'avec un grand retard et n'a jamais abouti à un résultat entièrement satisfaisant. Aujourd'hui encore, le boulevard n'est pas devenu une zone de flânerie avec des magasins attractifs, où les habitants de la ville et de l'agglomération aiment s'attarder et faire leurs achats. Il manque des arbres à l'ombre suffisante pour inviter à la détente. Les espaces sont peu harmonieux et les trottoirs trop étroits, notamment pour l'aménagement de grandes terrasses de bistrots. Seul le parc du Domino, que la Ville est en train de réaménager, offre de grandes qualités avec de la végétation.

Après l'introduction de la vitesse de 30 km/h sur le boulevard, le bruit de la circulation a diminué. Mais la Ville ne doit pas s'arrêter là. Le boulevard doit enfin offrir des conditions environnementales exceptionnelles pour les habitants et les commerces. Le Conseil communal a exprimé cette intention à plusieurs reprises, mais sans jamais la concrétiser. Dans le plan d'aménagement local révisé, seule une amélioration de la végétation est envisagée. La "requalification du boulevard de Pérolles" a certes été inscrite dans le projet d'Agglomération de 3ème génération, mais seulement en tant que catégorie B, c'est-à-dire avec un délai de réalisation prévu dans les années 2030. Pour augmenter l'attractivité du centre-ville et attirer plus de monde, c'est insuffisant. C'est pourquoi le Conseil communal devrait revoir la priorité de cet aménagement. La Ville a la chance d'avoir les moyens financiers de revaloriser ses espaces publics.

 

Réponse du Conseil communal

  1. Introduction: le boulevard de Pérolles aujourd’hui

Le boulevard de Pérolles est un élément structurant du territoire de la Ville de Fribourg, à la fois sous l’angle de l’urbanisation, du patrimoine bâti, de l’architecture, de la mobilité et du paysage. Il revêt également une importance de premier ordre dans la vie publique de la ville en tant qu’espace public majeur et espace de mise en relation entre différentes centralités (campus universitaire, parc du Domino, gare, etc.).

 

Conçu à la fin du 19ème siècle, le boulevard de Pérolles présente aujourd’hui un potentiel de requalification pour donner à cet espace une qualité urbaine renouvelée à la hauteur des enjeux urbains contemporains, dans le respect du patrimoine qui caractérise l’image de la ville de Fribourg.

 

Le plan d’aménagement local (PAL) de la Ville de Fribourg, dont le dossier de révision générale a été adopté par le Conseil communal en juin 2024, reconnaît l’importance stratégique du boulevard de Pérolles par différentes mesures inscrites notamment dans le dossier directeur. Les mesures de planification suivantes peuvent notamment être relevées:

  • Plan directeur communal en matière d’urbanisation: identification du boulevard de Pérolles en tant qu’espace ouvert viaire structurant à caractère urbain à requalifier.

  • Plan directeur communal en matière de Paysage: identification du boulevard de Pérolles en tant qu’espace présentant un aménagement paysager spécifique dont la qualité et le potentiel de biodiversité doivent être renforcés.
  • Plan directeur communal en matière de Mobilité: identification du boulevard de Pérolles en tant que requalification urbaine majeure avec interaction TIM-TP-MD.
  1. Une requalification du boulevard de Pérolles à mener dans le cadre des projets d’agglomération

Dès 2008, à travers le programme en faveur du trafic d’agglomération (PTA), la Confédération participe au financement de projets relatifs aux transports dans les villes et les agglomérations. Les contributions fédérales vont à des agglomérations dont les projets d’agglomération coordonnent efficacement le développement des transports et celui de l’urbanisation.

 

En tant que commune membre de l’Agglomération de Fribourg, la Ville de Fribourg a participé activement à l’élaboration des projets d’agglomération[1] de 2ème génération (PA2), de 3ème génération (PA3), de 4ème génération (PA4) et de 5ème génération (PA5). Dans ce cadre, plusieurs mesures infrastructurelles ont été inscrites dans les différentes générations de projet afin de pouvoir bénéficier d’une aide financière conséquente de la part de la Confédération. Cet apport financier extérieur est essentiel pour la Ville de Fribourg qui ne pourrait à elle seule financer l’ensemble des projets nécessaires au renouvellement de ses infrastructures de mobilité et à la requalification de l’espace public.

 

En ce sens, la requalification du boulevard de Pérolles a été inscrite et retenue en tant que mesure du projet d’agglomération de l’Agglomération de Fribourg à partir du PA2. Elle a ensuite été reprise et réinscrite dans le PA3, le PA4 ainsi que dans le PA5 qui a été approuvé par le Conseil d’Etat le 15 avril 2025 et qui sera déposé pour examen auprès de la Confédération fin juin 2025[2]

 

  1. La priorisation des mesures des projets d’agglomération: un exercice complexe et dépendant de plusieurs acteurs

À chaque génération de projet d’agglomération, les mesures infrastructurelles proposées par les communes doivent être priorisées et échelonnées temporellement. Les mesures les plus urgentes sont classées en priorité A, celles qui peuvent être réalisées plus tard en priorité B et finalement celles qui orienteront les interventions à long terme en priorité C.

 

Les horizons de réalisation pour les mesures du PA5 sont: Priorité A: réalisation entre 2028-2032, Priorité B: réalisation entre 2032-2036 et Priorité C: réalisation après 2036.

 

La priorisation des mesures des projets d’agglomération est un exercice très complexe qui dépend à la fois de réflexions et de choix menés à l’interne par les communes, de négociations stratégiques entre les communes participantes aux projets d’agglomération et l’Agglomération de Fribourg (organisme responsable des projets) et de critères techniques définis par la Confédération.

 

Le choix de la priorisation doit être mûrement réfléchi car les communes s’engagent ensuite de manière contraignante à lancer les projets et les procédures nécessaires dans le strict respect des délais prévus par la Confédération et à assurer le préfinancement des réalisations.

 

À chaque génération de projet d’agglomération, la Commune de Fribourg doit ainsi conduire une analyse détaillée pour déterminer l’urgence des besoins infrastructurels sur l’ensemble de son territoire et échelonner ceux-ci dans le temps en fonction de ses ressources internes limitées en termes de capacité financière et de disponibilité en main d’œuvre technique.

 

L’Agglomération de Fribourg, organisme responsable des projets d’agglomération de l’Agglomération de Fribourg, doit ensuite arbitrer l’ensemble des mesures et des priorisations proposées par les communes[3]. En effet, la priorisation des mesures a un impact déterminant sur l’évaluation et la notation des projets d’agglomération par la Confédération, qui se base sur une analyse des "coûts" et de l’"utilité" des mesures classées en priorité A ou B (les mesures C n’étant pas incluses dans cette analyse). En effet, si les coûts d’un projet d’agglomération (coût de l’ensemble des mesures classées en priorité A ou B) sont jugés trop élevés par rapport à son utilité par la Confédération, la contribution financière va être moins importante, voire non accordée.

 

Enfin, la Confédération émet des Directives[4] qui détaillent de manière stricte les exigences formelles à respecter pour l’ensemble des différentes priorités de mesures. En ce sens, la Confédération exige un état de maturité technique avancé pour les projets inscrits dans les priorités plus urgentes. Afin qu’une mesure puisse être inscrite dans une priorité élevée, des études préliminaires sont notamment à fournir (esquisses de projet, preuve de faisabilité, implications foncières, etc.). Au surplus, des exigences supplémentaires sont à respecter pour les mesures présentant des coûts particulièrement élevés.

 

  1. La priorisation de la requalification du boulevard de Pérolles dans le cadre du PA5

Dans le cadre des réalisations des projets d’agglomération, la Ville de Fribourg a souhaité prioriser l’allocation des ressources financières et humaines disponibles aux mesures considérées comme les plus urgentes et avancées en termes de mobilité et d’espace public, telles que par exemple les requalifications des secteurs de la Gare, du Bourg, de la place du Pertuis, de la place du Petit-Saint-Jean ou de l’étang du Jura.

 

Le réaménagement du boulevard de Pérolles, quant à lui, a été estimé en 2024 à CHF 15'886'000.-. Dans un premier temps et après une pesée des intérêts attentive effectuée par le Conseil communal, ce dernier a souhaité inscrire la requalification du boulevard de Pérolles en priorité B (réalisation à prévoir sur la période 2032-2036) dans le cadre du PA5.

 

Cependant, au mois de septembre 2024, sur la base d’une analyse technique et financière de l’ensemble des mesures déposées par les 25 communes participant au PA5, les services techniques de l’Agglomération ont demandé à la Ville de Fribourg la repriorisation d’une série de mesures, dans le but d’optimiser le rapport coût-utilité du PA5. Parmi les mesures à reconsidérer, l’Agglomération a demandé le déclassement de la requalification du boulevard de Pérolles (de priorité B à priorité C) car elle considérait que ce projet n’atteignait pas le degré de maturité technique attendu par la Confédération pour les projets en priorité B.

 

Suite à ce retour de la part de l’Agglomération, le Conseil communal a validé en octobre 2024 une actualisation des priorisations du catalogue de mesures à inscrire au PA5. En ce qui concerne la mesure de la requalification du boulevard de Pérolles, la Ville de Fribourg a considéré l’analyse de l’Agglomération comme pertinente et a accepté de classer le projet en priorité C (réalisation après 2036). Lors de la séance du 19 décembre 2024 de la conférence régionale regroupant le Conseil d’Agglomération et les représentant·e·s des communes hors Agglo mis dans le périmètre du PA5, cette classification a été acceptée par toutes les parties prenantes. Le Conseil d’Etat a également accepté cette priorisation à travers sa décision du 15 avril 2025.

 

  1. Conclusion

Le Conseil communal est pleinement conscient de l’importance stratégique du boulevard de Pérolles. En ce sens, le besoin de requalification de cet axe urbain a été acté dans le PAL et dans les projets d’agglomération de générations successives. Toutefois, la priorisation et la planification d’un tel projet d’infrastructure, hautement complexe et coûteux, doit se faire sur la base d’une pesée des intérêts réfléchie et dépendante d’un grand nombre d’acteurs et de facteurs.

 

Sur la base de tout ce qui précède et dans le cadre du PA5, le Conseil communal retient que le projet de requalification du boulevard de Pérolles doit rester classé en priorité C au PA5. Le Conseil communal ne peux donc pas satisfaire la demande des postulants dans le cadre du PA5.

 

Il est précisé que d’une génération à l’autre de projet d’agglomération, les mesures inscrites peuvent être librement reprises et repriorisées (à la hausse ou à la baisse). Concrètement, cela signifie qu’une mesure classée en priorité C au PA5 pourra être réinscrite en priorité A ou B du PA6. Ceci signifie que la priorisation proposée dans le cadre des projets d’agglomération doit être comprise comme un élément de planification dynamique et évolutif et non pas comme un élément immuable. Il va sans dire que le moment venu, soit lors de l’élaboration du PA6, le Conseil communal réexaminera la pertinence et l’opportunité d’inscrire en priorité A ou B le projet de requalification du boulevard de Pérolles.

 

Le postulat n° 139 est ainsi liquidé.


[1] Les projets d’agglomération se composent d’un Volet stratégique et d’un Catalogue de mesures qui recense l’ensemble des projets infrastructurels pour lesquels les communes d’agglomération demandent un subventionnement à la Confédération.

[2] Le PTA prévoit des cycles de quatre ans. Les projets d’agglomération s’intègrent dans ce rythme. Dans le cadre d’un processus périodique et itératif, les générations antérieures sont mises à jour, développées et optimisées et les différentes mesures peuvent ainsi être affinées et reprises d’une génération de projet à l’autre.

[3] Pour rappel, le PA5 regroupe désormais 25 communes des districts de la Sarine et de la Singine.

[4] Directives pour le programme en faveur du trafic d’agglomération (DPTA).