Postulat n° 73 - Rapport final du Conseil communal

Demande d'étudier la conformité de la mise en zone 30 ou zone de rencontre des routes communales ou cantonales dans toute la ville

Résumé du postulat

La Ville a mis un nombre considérable de routes communales en zone 30 ou zone de rencontres. Ces mesures ont sécurisé et réduit les nuisances sonores de beaucoup d'endroits. Cependant, beaucoup d'autres souffrent toujours d'une vitesse du trafic motorisé et d'un bruit trop élevé. Aujourd'hui, alors que la jurisprudence suit même la tendance de zone 30 sur les routes cantonales, la Ville doit saisir l'occasion de mettre un maximum, voire toutes les routes dans ces zones sécurisées.

Le postulat demande donc un rapport sur la conformité de la mise en zone 30 de toutes les routes, à indiquer sur plan de la ville. Nous attendons par la suite des mesures rapides, ainsi qu'un accord avec les autorités cantonales pour des procédures accélérées par rapport à celles qui durent actuellement en général cinq ans.

Réponse du Conseil communal

Depuis plusieurs années, les zones à vitesse limitée se sont multipliées en ville de Fribourg. Au 31 décembre 2018, 14 zones 30 km/h et 6 zones de rencontre étaient en place en ville de Fribourg, localisées principalement sur des routes de dessertes et/ou collectrices.

Il est important, afin de se rendre compte de l’importance de l’étendue de ces zones à vitesse limitée, de donner des valeurs relatives. A ce jour, sur les quelque 73 km de routes en ville:

  • 3 km sont en zone de rencontre (4%),
  • 23 km sont en zone 30 km/h (32%),
  • 1 km en zone piétonne (1.5%). 

Projets en cours

Par ailleurs, plusieurs projets de mise en zone 30 km/h sont planifiés ou en cours de réalisation: zone 30 km/h des Cliniques, 1.2 km ou encore deux zones 30 km/h dans le quartier du Jura (4,5 km). Ces nouvelles zones ajouteront 5,7 km supplémentaires de routes à 30 km/h, soit environ un ajout de 8%, pour un total cumulé de 45.5%. Ces projets ont pour objectifs d’améliorer la qualité de vie des habitants, de renforcer la sécurité et de réduire le bruit et les polluants.

Aussi, des zones à vitesse limitée supplémentaires ou des abaissements de vitesse sont projetés dans le cadre des projets de requalification, comme par exemple au carrefour de Richemond ou dans le quartier du Bourg.

Limitation de vitesse vs zone à vitesse modérée

Quand on parle de réduction de la vitesse, il est important de faire la distinction entre les zones à vitesse modérée et les simples abaissements de la vitesse, leur unique point commun étant la réduction de la vitesse.

En effet, les zones à vitesse modérée (30 km/h et zone de rencontre) sont règlementées par l’Ordonnance fédérale sur les zones 30 km/h et les zones de rencontre du 28 janvier 2001. Lorsque l’on instaure une telle zone, il est nécessaire de produire préalablement une expertise qui permet de justifier sa mise en place et son fonctionnement, puis de faire un bilan après une année pour vérifier si les objectifs sont atteints, notamment en matière de sécurité et de respect des vitesses. Dans son article 6, l’Ordonnance précise: L'efficacité des mesures réalisées doit être vérifiée après une année au plus tard. Si les objectifs visés n'ont pas été atteints, il y a lieu de prendre des mesures supplémentaires.

Le but des zones de rencontre et des zones 30 km/h est de favoriser la mixité entre les différents usagers. A cet effet, l’Ordonnance fédérale impose, outre l’abaissement de la vitesse, la suppression des passages piétons, la démarcation des entrées et sorties de zone et la priorité de droite aux carrefours. Outre ces aspects légaux, la mise en place de zones 30 km/h et de zones de rencontre s’accompagne systématiquement de mesures d’aménagement et / ou des mesures de modération permettant de tendre vers un respect de la limitation de la vitesse mais aussi d’atténuer le caractère routier de la rue, afin de la rendre plus agréable et conviviale pour l’ensemble et des usagers des riverains.

Pour les zones de rencontre, la réalisation d’un réaménagement complet est recommandée et souhaitée afin de renforcer le changement de priorité entre les modes de déplacement, le piéton devenant prioritaire par rapport au trafic automobile. Dans ce cadre, des aménagements visant à éliminer la séparation physique des modes sont réalisés, notamment par un aménagement de façade à façade avec de très faibles différences de niveaux.

L’autre possibilité permettant de réduire la vitesse est l’abaissement de la vitesse sans passer par une limitation de vitesse par zone. Cette possibilité est réglée par l’Ordonnance sur la signalisation routière (art. 108). Il est en effet possible, en application de cet article, de déroger aux limitations générales de vitesse, principalement pour des motifs environnementaux (bruit, polluants), de fluidité du trafic ou pour éviter certains dangers liés à la circulation routière. Si ces objectifs sont communs à ceux visés pour les zones à vitesse limitée, la principale différence réside dans le fait que le simple abaissement de la vitesse est mis en place sur la voie existante. En effet, les passages piétons sont maintenus, les priorités sont inchangées et aucune mesure d’aménagement n’est prévue.

Contrairement aux zones à vitesse limitée, où la cohabitation entre les différents modes de déplacement ou encore l’atténuation du caractère routier sont recherchés, ce en sus des améliorations environnementales ou sécuritaires, les simples abaissements de vitesse visent en premier lieu à améliorer les conditions environnementales et sécuritaires.

Toutefois, tout comme pour l’instauration des zones à vitesse limitée, un abaissement de la vitesse doit s’accompagner d’une expertise.

Dans les deux cas de figure, la compétence pour abaisser les vitesses incombe à l’Ingénieur cantonal. La Ville de Fribourg a à plusieurs reprises sollicité la DAEC afin d’obtenir cette délégation de compétence, pour les routes communales représentant la majeure partie du réseau routier localisé sur le territoire de la Ville. Cette sollicitation n’a à ce jour pas encore abouti.

Impacts sur les piétons

La réduction de la vitesse à 30 km/h offre davantage de sécurité, en particulier pour les enfants sur le chemin de l’école, les aînés et pour tous les autres piétons. En effet, il est plus aisé et surtout beaucoup plus sûr de traverser une route dont la vitesse est limitée à 30 km/h plutôt qu’à 50 km/h, ce en particulier pour les personnes vulnérables que sont les enfants et les aînés. Une étude a montré que les accidents impliquant des enfants étaient 3,2 fois moins fréquents lorsque les véhicules roulaient à moins de 40 km/h plutôt qu’à 50 km/h. L’amélioration de la sécurité routière réside dans le fait que le champ de vision est plus élargi à 30 km/h qu’à 50 km/h. En effet, le conducteur fixe son regard sur l’endroit où il se trouvera dans les 2 à 3 secondes qui suivent. Plus la vitesse est grande, plus le regard est lointain. A contrario, plus la vitesse est lente, plus l’automobiliste a le temps d’observer les alentours proches, ce qui lui permet de réagir et d’anticiper plus rapidement si un événement survient aux abords de la route. 

Par ailleurs, en cas de freinage, une automobile circulant à 30 km/h a besoin d’une distance de 21 mètres pour s’arrêter tandis qu’un véhicule roulant à 50 km/h n’aura pas encore commencé à freiner puisque sa distance de réaction est de 28 m et qu’il faut encore 13 m pour s’arrêter complètement.

Force est de constater qu’une diminution de la vitesse de quelques km/h fait une très grande différence entre un accident évité de justesse et un accident inévitable, mais aussi entre des conséquences peu graves et des conséquences potentiellement fatales.

Enfin, il est démontré statistiquement que la gravité des blessures s’accroît d’une manière exponentielle avec l’augmentation de la vitesse du véhicule impliqué. Il s’agit là d’un facteur primordial, dans la mesure où les piétons, cycles et automobiles partagent la chaussée. Une réduction de vitesse de 10 km/h diminue de moitié le risque de décès de piétons en cas d’accident.

Impacts sur la santé

Outre les impacts quantitatifs en relation avec la sécurité routière ou les nuisances sonores, des études ont démontré que le bruit routier a des effets physiologiques (problèmes cardiovasculaires, diminution de la profondeur du sommeil) ou encore psychologiques (stress, nervosité, tension, baisse de productivité).

Un problème surtout urbain

Le bruit du trafic est avant tout un problème environnemental des villes et des agglomérations. Plus de 90 % des personnes qui sont affectées par le bruit du trafic vivent dans des grands centres urbains ou en périphérie.

Sur 1,1 million de personnes affectées le jour par le bruit excessif du trafic routier, 81 % se trouvent dans les centres urbains, 11 % dans les espaces sous influence des centres urbains et 8 % dans les espaces hors influence des centres urbains.

Des changements même infimes dans la charge sonore induisent d’importantes variations du nombre de personnes exposées. Ainsi, une réduction à grande échelle de 3 dB du bruit du trafic routier ramènerait les nuisances en dessous de la valeur limite pour la moitié des personnes exposées.

Source: https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/bruit/info-specialistes/exposition-au-bruit/etat-de-l_exposition-au-bruit-en-suisse.html

Impacts sur les transports publics

Les transports publics en ville de Fribourg ont une vitesse commerciale moyenne de l’ordre de 20-25 km/h. La mise en place de limitations de la vitesse ne devrait pas avoir d’incidences majeures pour les véhicules de transports publics.

Fluidité du trafic

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, une limitation de la vitesse à 30 km/h a également des effets en matière de fluidité du trafic.  En effet, dans le cadre de la circulation routière, où une mixité d’usagers se côtoient (automobiles, cycles, piétons), il est nécessaire et indispensable de laisser entre les différents véhicules une distance de sécurité dépendante de la vitesse pratiquée. Par ailleurs, il est important de rappeler que les routes ne constituent pas un système clos mais comportent des interactions avec les carrefours, accès privés, passages piétons, places de parc qui impactent la vitesse de circulation. Tous ces éléments font que les automobilistes doivent freiner, accélérer, bifurquer, dépasser, etc… Ces actions induisent un phénomène d’accordéon, qui peut par la suite engendrer des bouchons. Un abaissement des vitesses permet de mieux anticiper ces événements et limiter ces phénomènes. Dès lors, dans un flux de circulation aussi irrégulier, une diminution de la vitesse s’avère efficace.

En conséquence, pour aller vite, il suffit de rouler plus doucement, c’est une question de vitesse moyenne. Si on améliore la vitesse moyenne, on réduit le temps de déplacement.

Impact sur les cycles

Compte tenu du fait que la différence de vitesse entre les cycles et le trafic individuel motorisé devient plus faible, en cas de limitation de la vitesse à 30 km/h, les cyclistes peuvent plus facilement et dans de meilleures conditions sécuritaires bifurquer ou quitter une route. Par ailleurs, un apaisement des vitesses facilite la cohabitation entre les différents usagers de la voirie, notamment par une diminution de l’agressivité, et le respect mutuel est garant de plus de sécurité.

Conformité avec le PAL en révision

Le PAL en révision de la Ville est planifié dans le sens d’un abaissement des vitesses, de manière à favoriser et faciliter la cohabitation entre les usagers de la mobilité douce, les transports publics ou encore le trafic individuel motorisé (TIM) tout en améliorant la qualité de vie des habitants (diminution des nuisances sonores). 

Gabarit des voies

La limitation de vitesse par défaut en localité à 50 km/h, qui découle de l’Ordonnance fédérale sur la circulation routière (OCR), pose de plus en plus problème en milieu urbain, à Fribourg comme ailleurs. Cette vitesse est inadaptée à des milieux densément peuplés, en raison des problèmes de cohabitation qu’elle pose entre le trafic individuel motorisé et le reste des usagers (piétons, cyclistes, bus). L’OCR date de 1962, une époque où il paraissait évident de privilégier à tout prix les déplacements en voiture alors que les contraintes sont aujourd’hui complètement différentes. La mise en place d’une limitation à 30 km/h, réduisant la vitesse des véhicules, permet de libérer de l’espace sur les routes, pouvant être affecté pour la mobilité douce notamment. En effet, si une voiture et un camion doivent se croiser à 50 km/h, cela implique d’avoir une largeur de chaussée de 6.40 m, passant à 5.70 m lorsque la vitesse est abaissée à 30 km/h. Ce gain d’espace permettra de revoir l’affectation de la chaussée pour offrir notamment de l’espace supplémentaire plus conséquent pour la mobilité douce.

Bruit routier

Conformément aux dispositions inscrites dans l’Ordonnance pour la protection contre le bruit (OPB), les propriétaires d’infrastructures routières sont tenus d’assainir leurs équipements quand les valeurs limite d’immission (VLI) sont dépassées. Un délai d’assainissement a été fixé au 31 mars 2018. Sur la base du cadastre du bruit routier, une étude d’assainissement a été entreprise, afin de définir les mesures à prendre en fonction des différents tronçons routiers présentant des dépassements. Il est à noter que tout dépassement des valeurs d'alarme (VA) impose un assainissement. Sont considérées comme assainissement les mesures prises à la source (revêtement type phono-absorbant, baisse de la charge de trafic et limitation de vitesse) et les mesures prises sur la propagation de l’onde (écran antibruit). La jurisprudence impose la prise de mesure à la source plutôt que sur la propagation de l’onde.

Pour les dépassements des VLI, des mesures doivent être prises à la source et, si nécessaire, sur la propagation de l’onde. Dans le cas où un dépassement des VLI serait toujours avéré après la prise de mesures d’assainissement, il est prévu de procéder à une demande d’allégement. Cette dernière consiste à baisser "artificiellement" le niveau sonore constaté au-dessous de la limite des VLI.

Au mois d’octobre 2017, le Conseiller d’Etat responsable de la DAEC, accompagné du responsable de la section bruit du SEn, demandait une rencontre avec la Ville. L’objet de la discussion a porté sur la baisse des vitesses légales sur les tronçons routiers présentant un dépassement des VLI après prises de mesures comme la mise en place de revêtements phono-absorbants. Cette demande peut paraître légitime, dans le sens où la baisse de la vitesse légale a un impact sur le bruit.

Sur demande de la DAEC, la Ville a analysé l’impact d’une limitation de la vitesse sur les axes sur lesquels les VLI étaient dépassées et sur lesquels des allégements devaient être prononcés. Un mandat a été donné pour mener à bien cette étude. Il en ressort qu’il serait opportun d’abaisser les vitesses sur certains axes, dont des axes principaux. En collaboration avec le Service du génie civil, le Service de la mobilité a analysé les axes sur lesquels un abaissement de la vitesse serait bénéfique du point de vue acoustique, en tenant compte de la cohérence et la lisibilité avec les zones à vitesse limitée déjà existantes en Ville, de la compréhension des usagers, de la complexité de mise en œuvre et de l’aspect sécuritaire.

La stratégie retenue est illustrée dans le plan en annexe, qui répertorie les zones 30 km/h et zones de rencontre existantes et projetées, ainsi que les possibles baisses des vitesses qu’il serait souhaitable d’introduire. Il s’agirait dans un premier temps d’abaisser la vitesse à 30 km/h de jour comme de nuit, sans passer par une zone à vitesse limitée.

Parmi les axes sur lesquels un abaissement de la vitesse est proposé, on retrouve, notamment, des pénétrantes comme la route du Jura, la route de Villars, l’avenue de Beauregard, ou encore la rue de Morat. 

Suite des travaux

Comme susmentionné, une réduction de la vitesse, tant par simple abaissement que par une zone, permettrait ainsi d’atteindre un double objectif, en matière de nuisance sonore et de respect de l’OPB d’une part et en matière de mobilité d’autre part, avec une augmentation significative de la sécurité et de l’amélioration des conditions de la mobilité douce. Le Conseil communal a décidé l’abaissement des vitesses de 50 à 30 km/h sur les axes figurant sur le plan annexé. Il a demandé à la DAEC de procéder à l’abaissement des vitesses sur les axes mentionnés.

Dans un premier temps, la baisse concernerait avant tout une limitation de vitesse et non pas une mise en zone. Néanmoins, en fonction des expertises et des endroits, il n’est pas exclu d’engager des procédures afin de mettre en place ultérieurement des zones 30, voire dans des cas spécifiques l’instauration de zones de rencontre.

Conclusions

Le Conseil communal est d’avis qu’une baisse des vitesses en ville serait bénéfique pour l’ensemble des habitants et des usagers. La mise en place systématique de zones 30 km/h et zones de rencontre ne semble toutefois pas le bon outil pour parvenir à cet objectif et il parait plus adéquat de réaliser un projet mixte mélangeant des mesures d’abaissement de vitesse et la création de nouvelles zones à vitesse modérée.

Le Conseil communal rappelle que la compétence pour abaisser les vitesses autorisées sur un axe routier relève bien du Canton et non pas de la Commune et que la stratégie de lier l’abaissement des vitesses et la lutte contre le bruit paraît la plus à même d’être mise en œuvre rapidement dans la mesure où le SPC est concerné par l’OPB sur les routes cantonales qui traversent la ville. Le Conseil communal entend continuer à œuvrer dans le sens de ce qui précède par l’intermédiaire d’une bonne collaboration des services concernés que sont le Service de la mobilité et celui du génie civil.

Le postulat no 73 est ainsi liquidé.