Prise de position de la Ville de Fribourg sur l'avant-projet de loi sur les institutions culturelles de l'Etat (LICE)
Dans le cadre de la révision de la loi sur les institutions culturelles de l’Etat (LICE), l’Etat a mis en en consultation publique l’avant-projet de loi. La Ville de Fribourg publie sa prise de position officielle. La consultation publique s'est close le 19 janvier 2025.
La Ville de Fribourg salue l’opportunité proposée par la DFAC de pouvoir réfléchir parallèlement à la révision de deux textes législatifs d’importance concernant la politique culturelle dans le canton de Fribourg. Dans l’ensemble, la Ville salue le travail réalisé en vue de la révision de la LICE.
Elle souligne d’emblée que l’entrée en vigueur de ces deux lois devrait se faire le plus vite possible en 2026, vu les changements de gouvernance nécessaires en lien avec la transformation de l’Agglomération de Fribourg.
Observations conditionnelles
Investissements et coût de fonction des institutions culturelles de l’Etat (ICE). Les investissements engagés, au service des institutions culturelles de l’État (ICE), sont très importants: BCU : CHF 120 millions ; MHNF : devisé à CHF 65,5 millions ; SIC : devisé à CHF 56 millions. Quant aux coûts de fonctionnement des ICE dans le budget annuel de l’Etat, ils atteignent CHF 50 millions. De tels investissements et de tels coûts de fonctionnement sont justifiés et mettent en évidence que ces institutions sont celles de toutes les Fribourgeoises et de tous les Fribourgeois.
Processus de révision de la LICE La révision de la LAC s’est appuyée sur un processus participatif très important et très large. Pour la LICE, pas de concertation sauf à l’interne des institutions elles-mêmes et entre elles. Pourtant, en comparaison, les montants concernés par la LEAC semblent presque dérisoires puisqu’ils ne comprennent pas d’investissements et que les montants annuels de soutien équivalent à CHF 4,5 millions, soit 12 fois moins que le budget de fonctionnement des ICE.
Dans ce contexte, la Ville de Fribourg s’interroge sur les points suivants :
Quel est le rôle et la place des faîtières culturelles (AMCF, BiblioFR, Fédération fribourgeoise des Chorales, Société cantonale des musiques fribourgeoise) dans le fonctionnement de l’écosystème culturel fribourgeois en relation avec les institutions culturelles de l’État ?
Quelle est la nature et l’ampleur des relations de collaboration des « autres institutions culturelles » avec les institutions culturelles de l’État, ainsi qu’avec les régions culturelles prévues dans la nouvelle LEAC ?
La méthode et le calendrier de la mise en consultation de la LICE et de la LEAC : la LICE aurait dû intégrer une réflexion participative plus large et suivre le même calendrier que la révision de la LAC. Comme la Ville de Fribourg l’a relevé dans sa prise de position relative à la LEAC, elle regrette l’absence d’un aperçu global sur la documentation en consultation. Le cadre législatif et réglementaire envisagé (LEAC, LICE et futurs règlements d’exécution) est présenté de manière segmentée, sans permettre une appréciation cohérente de l’ensemble législatif final. Ce manque de visibilité complique l’évaluation des incidences pour la Ville de Fribourg et ses acteurs culturels.
Relation entre l’Etat et les autres institutions culturelles Avec l’article 4, le texte ouvre des perspectives, avec le soutien potentiel de l’État, au financement d’investissements et/ou de fonctionnement des autres institutions culturelles d’intérêt cantonal. Selon quels critères est-il déterminé qu’une institution culturelle est « d’intérêt cantonal » ?
Importance des bibliothèques comme institutions culturelles à part entière Les statistiques de l’OFS montrent que les bibliothèques sont les institutions culturelles les plus fréquentées (OFS, 2024). A la croisée des politiques culturelle, sociale et de formation, elles jouent un rôle crucial pour atteindre les objectifs formulés dans ce projet de loi. La Ville de Fribourg estime que cette loi manque d’ambition et ne prévoit pas assez de moyens (RH et financiers) au regard des enjeux.
Mise en réseau et complémentarité des bibliothèques du canton A l’échelle du territoire cantonal, chaque bibliothèque, de quelque nature qu’elle soit (cantonale, de haute école, publique, scolaire, mixte) a un rôle essentiel à jouer, en complémentarité avec les autres. Cette complémentarité doit être à la fois facilitée et encouragée. Le développement et la pérennisation d’un réseau de bibliothèques efficace à l’échelle du canton de Fribourg passe donc par leur ancrage dans la législation cantonale, via les missions de la BCU. Cela implique que l’Etat joue un rôle de leader en la matière et s’investisse activement en élaborant une stratégie et un plan directeur pour les bibliothèques et en assurant un soutien financier pérenne pour leur fonctionnement.
En ce qui concerne les missions de la BCU au service de la population cantonale, nous soulignons le manque d’adéquation entre la loi et son applicabilité. En effet l’offre de la BCU ne touche pas toutes les catégories de la population, notamment les enfants de 0 à 14 ans et les personnes résidant en dehors de l’agglomération fribourgeoise qui ne bénéficient pas de sa proximité. De fait, l’ensemble des missions des bibliothèques publiques vis-à-vis de la petite enfance jusqu’à l’adolescence ainsi que la dimension de proximité, incombent aux communes, soit les missions éducative, sociale et culturelle dont les enjeux sont majeurs. Cette délégation de compétences aux communes doit être reconnue par l’Etat et faire l’objet d’un soutien financier pérenne pour le fonctionnement des bibliothèques publiques et scolaires. Certains cantons ont déjà mis en place des mécanismes incitatifs dans ce sens.
En outre, la BCU devrait intégrer comme mission la coordination des bibliothèques scolaires. Le panorama romand des bibliothèques scolaires indique clairement que le canton de Fribourg est en retard sur ses voisins. Dans le canton de Vaud, et dans une moindre mesure, à Genève, la coordination est institutionnalisée : le Valais est en cours de réflexion en ce sens. A minima, la coordinatrice des bibliothèques publiques devrait assurer également la coordination des bibliothèques scolaires.
L’Etat doit prendre ses responsabilités, aller plus loin que cette contribution au travail en réseau et ancrer cette mission dans la loi. Le règlement d’application de la loi doit préciser le subventionnement régulier du fonctionnement des bibliothèques publiques et scolaires, et ses modalités d’octroi.
Financement du Conservatoire La Ville de Fribourg souhaite que les communes jouent un rôle décisionnel principalement en lien avec les aspects budgétaires. En effet, les communes participent à un financement de 50% mais ne font que le préaviser, une fois le budget validé par le Conseil d’Etat. Il faut toutefois reconnaître que le financement du Conservatoire pour moitié par l’Etat est une excellente solution qui n’est de loin pas équivalente dans les autres cantons.
Musée d’art, d’archéologie et d’histoire Avec l’abandon du projet de Musée archéologique cantonal, la mission de la valorisation ainsi que la prise en charge des expositions des collections archéologiques est du ressort du MAHF, alors que la conservation et la documentation des collections demeure la mission du Service archéologique de l’Etat (SAEF). Il en va de même pour le Musée de Vallon. Ce partage de missions reste flou et devrait être clarifié dans le règlement d’exécution. Pourtant, dans le rapport explicatif, chapitre 5 Incidences financières et en personnel, il est mentionné que « par rapport à la loi actuelle, le renoncement à un musée archéologique et l’intégration de ses missions patrimoniales et muséales au sein du MAHF permettra de facto de ne pas engager de nouveaux coûts d’investissement ou de fonctionnement pour une telle institution culturelle. » Les spécificités propres à ce domaine, la complexité accrue de la mission et son élargissement ne valent-elles pas une institution et une équipe dédiée?
La Ville de Fribourg regrette le renoncement, officialisé dans cet avant-projet, de la création d’un musée cantonal d’archéologie, ambitionné dès 1991. Il est important de rappeler que les collections archéologiques cantonales, notamment celles qui concerne le Haut-Moyen-Âge sont parmi les plus importantes et les plus riches d’Europe. La Ville de Fribourg souhaite avoir des informations complémentaires sur les moyens qui seront mis en œuvre pour valoriser ces importantes collections archéologiques.
Sauvegarde du patrimoine culturel fribourgeois Dans le rapport explicatif, il est fait mention d’un « groupe patrimoine » composé de représentant.e.s des institutions culturelles et des unités administratives de l’Etat en charge de la sauvegarde patrimoniale (SAEF, SBC, AEF, SeCu). Il paraît essentiel d’intégrer deux membres du comité de l’AMCF issus d’institutions culturelles non étatiques afin de relayer les problématiques liées à la gestion du patrimoine fribourgeois au sein des institutions non étatiques. La présence de deux membres du comité de l’AMCF est d’autant plus importante que ce « groupe patrimoine » aura « un rôle central dans la gouvernance » du futur SIC auquel prendront part plusieurs institutions non étatiques membres de l’AMCF.
Demandes d’adaptation du texte de loi
Art. 3 Al. 1 : il est proposé de modifier comme suit : « … (ci-après : les institutions de l’Etat). ». Il s’agit de faire la distinction, dans cet article et dans les suivants, entre les institutions de l’Etat et les autres institutions culturelles.
Art. 4 Al. 3 : il est proposé de compléter cet alinéa comme suit « …d’institutions culturelles d’intérêt cantonal fondées par des tiers, dont des régions culturelles (au sens de l’art. 12 al. 3 de la LEAC) ou des villes-centres (au sens de l’art. 12 al. 4 de la LEAC). ».
Art. 5 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit, « …les institutions de l’Etat ont les missions communes… ».
Al. 2 : il est proposé de supprimer la dernière partie de cet alinéa, « Dans l’accomplissement…(LEAC). »
Cet article repose sur le fait que la LEAC entrera en vigueur selon les termes de son avant-projet. Comment s’articule juridiquement LEAC et LICE ? Les dispositions de la LEAC s’appliquent-elles pour les ICE ?
En outre, concernant les questions de rémunérations et de prévoyance sociale, et selon le Rapport explicatif de la LICE, « l’Etat, par ses institutions culturelles, a un devoir d’exemplarité en la matière et dans leurs missions communes et spécifiques. ». Cela signifie-t-il que les principes déontologiques de l’ICOM Suisse s’appliquent aux musées cantonaux ? Que le code d’éthique pour les bibliothécaires et professionnel.le.s de l’information de BiblioSuisse s’appliquent à la BCU ? Que les principes de rémunération des musiciennes et musiciens professionnel.le.s s’appliquent aux enseignants du Conservatoire engagés par l’État comme actrices et acteurs culturels indépendants ?
Art. 6 Al. 1 : : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit, « En matière de collaboration, les institutions de l’Etat ont les missions communes… ».
Al. 1, let. b) : il est proposé de modifier la let. b) comme suit : « Elles collaborent entre elles, avec les autres institutions culturelles, les faîtières cantonales et les services culturels concernés. » et d’ajouter une lettre supplémentaire.
Al. 1, let. c) : « Elles contribuent à la structuration des autres institutions culturelles par le biais de conventions afin de soutenir financièrement la professionnalisation (formation professionnelle et la formation continue) et la mise en réseau des autres institutions culturelles. Des subventions sont accordées pour atteindre ces missions. ».
La lettre c) devient la let. d).
En matière de collaboration, les missions communes des ICE devraient également intégrer l’aide à la structuration des autres institutions culturelles, le soutien à la coordination et à la mise en réseau, et un engagement très fort dans la formation professionnelle et la formation continue.
Chapitre II Organisation
Art. 7 l. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit, « …sur les institutions de l’Etat… ». Al. 2 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit, « …aux institutions de l’Etat… ».
Art. 8 Al. 1, let. a) : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …relatives aux institutions de l’Etat… ».
Art. 9 Al. 1, let. a) : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …et la coordination des institutions de l’Etat… ».
Art. 10 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « Chaque institution de l’Etat… ».
Art. 11 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …anime l’institution de l’Etat… ». Al. 3 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …concernant l’institution de l’Etat. ».
Art. 12 Al. 2 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …ainsi que la direction de l’institution de l’Etat… » et « …sans la direction de l’institution de l’Etat… ».
Art. 13 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …au développement de l’institution de l’Etat. ». Al. 2 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …La direction de l’institution de l’Etat… ».
Art. 14 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …du développement de l’institution de l’Etat. ».
Art. 15 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …la direction de l’institution de l’Etat. ».
Art. 17 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « …des institutions de l’Etat sont... ».
Art. 18 Al. 1 : il est proposé de modifier cet alinéa comme suit « Les institution de l’Etat peuvent... ».
Chapitre III.1 : Bibliothèque cantonale et universitaire (BCU)
Art. 19 Al. 2, let. a) : il est proposé de préciser cette lettre comme suit « …sur tous types de support, en tenant compte de l’environnement documentaire existant, et qui sont utiles… ». Considérant l’importance mise par la BCU sur le réseau et la coopération, il est important qu’elle mentionne l’environnement documentaire existant sur un territoire donné concernant le développement de ses collections. Al 2, let. c) : il est proposé de modifier la lettre c) comme suite : « à favoriser l'accès à des services bibliothéconomiques de qualité ; ». Al 2, let. d) : il est proposé d’ajouter une lettre d) : « à favoriser le développement et la coordination du réseau des bibliothèques publiques et scolaires, en leur assurant un soutien financier pérenne pour un fonctionnement durable. ».
Chapitre III.2 : Conservatoire
Art. 21. Al. 1, let. b) : il est proposé de compléter la phrase comme suit « …artistiques fribourgeois. Le Conservatoire met en place des dispositifs de soutien aux jeunes musicien.ne.s au terme de leur formation. ».
Chapitre III.3 : Musée d’art, d’archéologie et d’histoire
Art 29. Al. 1, let. h) : ces missions rejoignent celles de l’AMCF. Il faudrait clarifier les règles de fonctionnement et de collaboration entre les musées en tenant compte de la faîtière. Al. 1, let. i) : Quelles sont les missions spécifiques du MAHF ? Quels impacts pour Fri Art, le Musée de Charmey, notamment ? En quoi consistent ces « possibilités particulières d’exposition » ? Les expositions vente font-elles partie de ces possibilités particulières ?